mercredi 30 janvier 2013

[Brève] 30 janvier 1933 - 30 janvier 2013

A l'occasion du 80e anniversaire de la "prise de pouvoir" nazie, une cérémonie de commémoration est organisée ce matin au Bundestag...

Sur la chaîne publique d'information Phoenix, on poursuit le programme avec une prise de parole de la chancelière, qui fait un bref rappel historique et insiste sur le fait que le national-socialisme ne fut possible en Allemagne qu'avec la collaboration des élites et parce que la majeure partie de la population a accepté ou toléré son avènement ("gedultet")...

Un peu plus tard, Mme Merkel recevra M. Mursi, le président égyptien contesté, notamment pour ses mesures autoritaires, mais également pour ses propos antisémites...

Ainsi, l'histoire et l'actualité fusionnent.

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Sans véritable transition, on entend déjà l'hymne égyptien sur Phoenix... Puis, comme il se doit, le Deutschlandlied... Avant le traditionnel passage en revue des troupes, sur tapis rouge et sous les parapluies... Ensuite, ce sera la non moins traditionnelle conférence de presse des deux chefs d'Etat : vite expédiée. Sans autre commentaire que ce chapeau du Spiegel (je traduis) : "Lors de sa visite à Berlin, Mohammed Morsi a pu entendre des paroles claires de la part de la chancelière: Angela Merkel exhorta le président contesté à respecter la démocratie et la liberté religieuse. Le frère musulman rechigna à la critique - et justifia un propos par lequel il avait heurté des Juifs." 

Conférence de presse Morsi-Merkel, photo AFP @ Der Spiegel

dimanche 27 janvier 2013

[Brève] Non-rencontre au sommet

Angela Merkel, réputée "la plus puissante femme de RFA" et citoyenne de l'ex-RDA (1954-1990), passe un week-end diplomatico-commercial au Chili, où vit encore celle qui fut la plus puissante femme de RDA, Margot Honecker, veuve d'Erich Honecker, le tout-puissant président du Conseil d'Etat (1976-1989) de l'Allemagne communiste, où elle fut également ministre de l'Education de 1963 à 1989.

Les deux femmes ne se rencontreront pas. Et nous ne saurons pas si Margot Honecker profitera de l'occasion pour demander quelque faveur à la délégation allemande. Car, son frère venant de décéder à Berlin, la presse avait spéculé sur une possible venue de l'ex-première dame de RDA à l'enterrement. Cela n'aura pas été le cas. En effet, Mme Honecker pourrait encore risquer des poursuites si elle foulait le sol allemand. Mais comme elle le dit dans l'interview ci-dessous : L'Allemagne actuelle ne l'intéresse pas...

 

samedi 26 janvier 2013

[Feuilleton] Après zu Guttenberg, Schavan ?

A l'ère d'Internet, un certain nombre de personnalités en pays germaniques, où l'on peut, au même titre que les médecins, arborer fièrement son titre de docteur en sciences humaines, doivent craindre pour ce préfixe prestigieux, si elles ont triché lors de la rédaction de leur thèse. Zu Guttenberg (CSU), naguère ministre allemand de la Défense et favori pour la succession d'Angela Merkel, en a récemment fait les frais : démission, déshonneur...


Actuellement, c'est la ministre fédérale de l'Education et de la Recherche, Annette Schavan (CDU), qui est dans le collimateur des fouines qui, avec les moteurs de recherche, ont toutes les facilités du monde pour dénicher des passages qui, s'ils ne comportent pas de guillemets, n'en sont pas pour autant de la plume de l'auteur : on appelle cela du plagiat ou, en d'autres termes, de la triche...


Or, en pays germaniques, on ne triche pas, comme on ne traverse pas un passage clouté au rouge : c'est donner le mauvais exemple aux enfants et c'est dangereux, car les automobilistes ne calculent pas les piétons "anarchistes". En fait, on part du principe que vous êtes honnête, que vous faites ce que vous dites, que vous dites ce que vous êtes. Pour preuve : il n'y a pas de portillons automatiques dans le métro de Berlin...


Mais si vous avez le malheur, non seulement de tricher, mais d'être découvert, votre vie publique est définitivement fichue. Ainsi, l'université de Düsseldorf vient de diligenter une procédure à l'encontre d'Annette Schavan afin de savoir si elle peut toujours se prévaloir de son titre de docteur. Dans le cas contraire, la sanction serait immédiate : déshonneur, démission...


Certains essayent cependant de s'accrocher, comme l'ancien Président fédéral, Christian Wulf (CDU), qui s'était fait construire une villa aux frais de la princesse. Pendant un temps, il a essayé de louvoyer, de faire des cachoteries, de s'excuser, mais rien à faire : démission, déshonneur... et divorce !



P.S.: Les germanophones peuvent consulter le blog schavanplag où un certain nombre de passages douteux de la thèse en question sont répertoriés...

Annette Schavan, photo REUTERS @ Der Spiegel

jeudi 24 janvier 2013

[Aparté] La taupe GB

Le problème, ce n'est pas la population britannique : ce sont des Européens comme les autres, avec des problèmes d'emploi, de retraite, de sécurité sociale, de "pouvoir d'achat", comme on a l'habitude de désigner le moutonnement consumériste...


Le problème, ce sont les dirigeants, et pas seulement M. Cameron qui est un CEO comme tant d'autres, mais surtout les économistes qui, chaque semaine nous donnent des leçons de savoir vivre par leur organe de prédilection, The Economist, et notamment les financiers qui sévissent sur la place boursière la plus forte d'Europe : London City !


Non, le problème, ce ne sont pas les Anglais, Gallois, Ecossais, Irlandais du Nord, qui sont des gens fort sympathiques, comme les Provençaux, les Bretons, les Bavarois ou les Saxons. Le problème, c'est la Livre Sterling, qui pèse lourd sur la finance européenne, comme d'ailleurs le Franc Suisse, alors que les Helvètes sont, comme les Wallons et les Flamands, des gens fort sympathiques !


Mais qui sait ? peut-être M. Cameron ne sera-t-il pas réélu et ne pourra-t-il donc pas organiser le référendum qu'il propose aujourd'hui. Un autre dirigeant - travailliste peut-être - organisera-t-il alors un référendum autrement plus important pour l'Europe : Peuples britanniques, souhaitez-vous abandonner la livre pour renforcer la Communauté Européenne et interdire un peu plus aux spéculateurs de miser sur la tête des pauvres gens ?


MrMme Merkel et Cameron à Davos, photo BPA/REUTERS @ Le Figaro

mardi 22 janvier 2013

Opération Charlemagne

Le cinquantenaire du Traité de l'Elysée est célébré à Berlin...

Au Bundestag, où plus de 1000 députés français et allemands se tiennent en rangs serrés, les orateurs se succèdent, chaque chef de fraction ou de groupe n'ayant que trois ou quatre minutes pour dire tout le bien qu'il pense de l'amitié franco-allemande...

Un tel consensus étonne et interroge…

On voit défiler libéraux et conservateurs, sociaux-démocrates et écologistes, gauchistes et ex-communistes, comme Gregor Gysi, avocat de formation, défenseur des contestataires en ex-RDA, qui évoque sa grand-mère, sauvée de la déportation en s’installant à Paris…

Au premier rang, une autre citoyenne d’ex-RDA, Mme Merkel, sourit, touchée par cette histoire, tandis que son voisin de droite (à gauche sur l’écran !), M. François Hollande, affiche un contentement malicieux…

Oui, ce consensus parlementaire, tout à fait exceptionnel, étonne et interroge : les discussions politiques (comme d’ailleurs les « disputationes » religieuses) ne pourraient-ils pas toujours se passer ainsi, dans le respect mutuel, l’honnêteté, la concentration sur l’objet ?

Non, décidément ! Dans les deux cadres nationaux qui sont les leurs, ces parlementaires se huent, se traitent de noms d’oiseaux, quittent la salle…

Et pourquoi ?

« Tous pareils ! » entend-on dire le fameux homme de la rue dont la réduction de complexité sévit ici, là-bas et un peu partout, mais qui a raison sur un point : le résultat des différentes politiques a toujours été le même puisqu’il n’a jamais influencé de façon décisive le status quo, le fameux cours des choses, dur et inéluctable…

«  Tous des vendus ! » l’entend-on ajouter, puisqu’il faut toujours en remettre une couche…

Et les voici réunis, tous pareils en effet, discourant à tour de rôle, évoquant la larme à l’œil deux guerres mondiales, oubliant au passage les guerres de 1870 et de 1618-1648, qui cimentèrent la légende de l’ennemi héréditaire (Erbfeind) ou, au choix, du frère ennemi, puisque nous sommes « français » et « allemands » – l’a-t-on assez souligné dans cette étonnante unanimité ? – les enfants (déshérités) de Charlemagne…

Oui, ce fut une belle opération Charlemagne, mais – un commentateur l’a remarqué – avec toutes ces belles paroles, on eût également souhaité une mesure phare, fût-elle symbolique !

  Charlemagne @ wikipedia

dimanche 20 janvier 2013

Résultats serrés en Basse-Saxe

La dernière élection régionale significative (Landtagswahl) avant l'élection du parlement national (Bundestagswahl) à la rentrée 2013 vient de se terminer en Basse-Saxe.

Le résultat est serré. Actuellement (ce 20 janvier à 23:00), la coalition sortante (CDU-FDP) et les challengers (SPD-Les Verts) font jeu égal. Minute après minute, on annonce l'une ou l'autre des deux alliances en tête avec un petit siège d'avance. On commence également à reparler d'une "grande coalition" (CDU-SPD).

Les Pirates et Die Linke ne franchissent pas la barre des 5% et n'auront donc pas de députés. Autant de voix perdues pour la coalition de gauche. Avec 10% des suffrages, les libéraux de FDP se rassurent après une crise autour de leur dirigeant Philipp Rösler, qui peut donc se maintenir à la tête du parti. Le gain de la FDP se fait de toute évidence aux dépens de la CDU d'Angela Merkel qui, avec quelque 36%, reste cependant le parti le plus fort de Basse-Saxe. Le SPD (32,6%) et surtout les Verts (13,7%) accroissent sensiblement leur électorat.

Pour l'heure, les infos régionales du NDR annoncent la possible victoire de la gauche. Toujours d'un seul siège...

C'est en tout début de journée de ce lundi 21 janvier que les médias allemands annoncent la courte victoire de la coalition SPD-Verts sur les sortants de la CDU et du FDP. Le Spiegel écrit (je traduis) : "Quel polar électoral en Basse-Saxe : toute la soirée, on pensait à un pat - mais le candidat du SPD Stephan Weil a finalement triomphé. Car les Rouges-Verts ont un siège de plus au parlement régional que l'alliance noire-jaune du Ministre-Président David McAllister."

Stephan Weil (SPD), photo Reuters @ Der Spiegel

Les résultats de cette élection test sont désormais acquis : CDU - 36,0%, SPD - 32,6%, Les Verts - 13,7%, FDP - 9,9 %, Die Linke - 3,1%, Parti des Pirates - 2,1%. N'ayant pas franchi la barre des 5%, ces deux dernières formations politiques n'entrent pas au parlement...

L'enjeu de cette élection est double : d'une part, il s'agit d'un "sondage" grandeur nature, en tout cas plus réaliste que les résultats des instituts d'opinion ; de l'autre, le Bundesrat, la représentation des Länder à Berlin, pourrait basculer à gauche, si Stephan Weil est élu Ministre-Pesident de Basse-Saxe, et si Les Verts mais aussi Die Linke y soutiennent le SPD.

dimanche 13 janvier 2013

SPD / Les Verts : Le test grandeur nature

Ce dimanche 20 janvier, une élection régionale - Landtagswahl - se tient en Basse-Saxe (capitale Hanovre) : en principe, la coalition rouge-verte (sociaux-démocrates / écologistes) part favorite, mais...

 Campagne électorale en Basse-Saxe
Photo @ Die Zeit

Même si les libéraux du FDP, autour de leur chef contesté, Philipp Rösler, ont perdu du terrain ces temps-ci, les derniers sondages estiment, peut-être à tort, que le parti pourrait passer la barre des 5% et intégrer le parlement de Basse-Saxe, ajoutant alors aux voix de son partenaire chrétien-démocrate pour éventuellement obtenir une majorité "noire-jaune" (CDU / FDP)...

Peer Steinbrück, le leader national du SPD, atteint des sommets d'impopularité après ses récentes déclarations. Même le soutien de Gerhard Schröder et d'autres personnalités n'y change rien. Or, le patron du parti, Sigmar Gabriel, vient d'affirmer que même si l'élection de Basse-Saxe était perdue, Peer Steinbrück resterait le champion du SPD pour l'élection nationale, alors que toujours plus de voix se font entendre en faveur d'une candidature de Hannelore Kraft, la sympathique Ministre-Présidente de Rhénanie-du-Nord-Westphalie (depuis 2010)...

De plus, la débacle autour du nouveau grand aéroport de Berlin, qui ne sera sans doute prêt qu'en 2014 (au lieu de 2012) et qui engloutit des milliards d'euros supplémentaires, affaiblit considérablement un autre illustre camarade du SPD, Klaus Wowereit, maire de Berlin depuis 2001, qui vient de sauver son poste au sein d'une "grande coalition" (SPD / CDU), alors qu'il avait déjà conduit la ville jusqu'en 2006 dans le cadre d'une alliance "rouge-rouge" (SPD / Die Linke). Cet opportunisme du médiatique maire de Berlin n'est pas pour remonter le moral des camarades. Et la faillite de l'Aéroport Willy Brandt - quelle idée de donner le nom de ce grand politicien social-démocrate à un gouffre financier assorti d'une réaction en chaîne d'incompétences - n'est pas vraiment de bonne augure pour un SPD qui se préparerait à gouverner le pays...

Pendant ce temps, Mme Merkel caracole en tête de tous les baromètres de popularité. Et rien, pas même le scandale à épisodes autour du président démissionnaire Christian Wulff (CDU), ne promet le plus petit nuage à l'horizon de ce ciel bleu de Prusse.

[Aparté] Le nationalisme des médias

Une étude comparative de la presse et de la télévision en France et en Allemagne, qu'il serait d'ailleurs utile d'étendre à d'autres pays européens, montrerait sans doute comment, sciemment ou involontairement, certains des rédacteurs et concepteurs des plus en vue sacrifient au provincialisme le plus stupide, en s'adressant de préférence aux "gens bien de chez nous", que l'on suppose solidement ancrés dans une "tradition" par ailleurs inventée de toutes pièces ou cousue de fil blanc. Sont mis en exergue les éternels faits divers qui "bouleversent (et divertissent) la nation", le sport présumé "national" - foot, rugby, cyclisme, drague - et les diverses célébrités dont la gloire "nationale" ne franchit jamais les frontières du pays, mais... ça fait si longtemps qu'ils sont là... Et puis il y a les inévitables feuilletons soi-disant enracinés dans la "culture populaire" que l'on n'hésite pas, depuis le grand art populaire des années 1920/30 ou même 1950/60, à niveler vers le bas avec un sans-gêne inouï qui n'a d'égal que la bêtise sans nom que l'on produit. Enfin ce sont les talk-shows, les nouveaux télé-crochets ou télé-réalités qui, s'ils sont désormais conçus sur le même moule dans le monde entier, ne cessent pourtant de lorgner sur les divers terroirs et types nationaux, ou plutôt leurs caricatures : oui, par-delà les modes internationales - punk, pop, rap, tatoo, techno, disco... - on reconnaît au premier rang le bon petit gars du cru et la brave fille du pays, sélectionnés dans d'impitoyables castings.


Il y en aurait à dire, en France et en Allemagne, sur ces pratiques et performances médiatiques qui abrutissent les (potentiels) citoyens européens en les maintenant dans leurs particularités nationales et, donc, en exacerbant les différences entre les gens, au lieu de mettre leurs points communs en valeur et de réunir ces (futurs) citoyens autour d'une "culture européenne commune", de préférence nivelée vers le haut ...

Mais le pire dans ces abrutissements nationaux, qui se constatent très certainement dans chacun des 27 pays de l'Union, ce sont encore ces médiatiques politiciens qui, à chaque élection, s'adressent à leurs "chers compatriotes" : Français ! Allemands ! - Ne se rendent-ils donc pas compte de l'exclusion qu'ils pratiquent à l'égard de tous les autres citoyens qui les écoutent, qui ne sont peut-être pas (encore) de la même nationalité, mais qui vivent (déjà) sur le même continent, qui sont également "chez eux" ici et là ? - Non, ils ne s'en rendent toujours pas compte, sinon ils arrêteraient de parler (et de raisonner) de cette manière rétrograde et totalement contre-productive, si tant est que nous sommes appelés à devenir ce que, par ailleurs, nous sommes déjà : Européens !